Les évolutions budgétaires de l'uB ces 3 dernières rentrées ont été particulièrement difficiles à comprendre. Beaucoup de facteurs externes sont venus perturber leurs lectures, mais il n'en demeure pas moins que des formations ont été fermées après la rentrée de 2017 (master REVI Italien et master MEEF Lettres Classiques) laissant les étudiants et les personnels de ces formations dans un grand désarroi. Pour rappel, un budget nettement déficitaire a été voté pour l'année 2017-18. Ce déficit de 2,8 millions d'euros a permis au rectorat de justifier un « plan de retour à l'équilibre » conduisant au gel de 60 postes d'enseignants-chercheurs et de 12 postes BIATSS (auxquels s'ajoutent 81 postes en publication différée qui sont autant de possibilités de titularisations en moins). Globalement, les dotations de l'Etat sont loin de suivre l'évolution des effectifs étudiants. Les conditions d'accueil des étudiant.es se dégradent régulièrement et les jolies allées ne remplaceront pas des taux d'encadrement raisonnable en TD/TP, pourtant essentiels à la réussite du plus grand nombre.

Après des efforts importants et des remboursements de l'Etat, l'équilibre est à nouveau atteint, malgré le sous-financement chronique de l'Etat. Le compte financier de 2018 s'est clotûré avec un solde financier à 9,9 millions d'euros. Cependant, cette situation ne remet pas en cause les fermetures de diplômes et le gel de postes, loin s'en faut. Les difficultés liées à la COMUE et le financement en mode projet renforcent les inégalités entre les recherches perçues comme non rentables (sciences humaines, travaux de recherche fondamentale...) et les autres. L'université, à travers le pilotage par les appels d'offre, se transforme progressivement en collège universitaire. Seuls les masters dits « d'excellence » associés aux trois thèmes de l'ISITE pourront vivre décemment (voire très confortablement puisque, pour certains d'entre-eux, les financements peuvent atteindre 600 000 euros). Ceux qui sont à côté de la plaque (pardon, des thématiques d'excellence) peuvent avoir un lot de consolation à condition de présenter des maquettes en anglais, et ainsi espérer glaner 75 000 euros. Mais ces financements sont directement conditionnés au maintien de l'ISITE : la pérennité de ces financements est donc très incertaine. Les autres formations feront avec les moyens du bord et devront générer des fonds propres, sous peine de disparaître. La logique globale consiste à spécialiser les universités sur des thèmes de prédilection, en supposant que plus on est gros, plus on est fort. Dans la logique du classement de Shanghai et la compétition pour une visibilité internationale afin d'attirer les étudiants du monde entier et rentabiliser l'université, les droits d'inscriptions pour les étudiants non communautaires seront maintenus sauf mouvement de rejet massif. Et sans réaction d'importance, les droits d'inscriptions seront également progressivement augmentés pour tous les étudiants (le mouvement est déjà amorcé avec les écoles d'ingénieurs).

Puisque l'Etat souhaite se désengager financièrement de l'enseignement supérieur, les fonds propres générés seront autant d'argent que l'Etat n'aura plus à dépenser. L'espoir que certains nourrissent de pouvoir effectivement posséder une forte autonomie budgétaire se transformera le plus souvent en miroir aux alouettes, car l'argent généré sera de plus en plus fortement prélevé pour assurer le fonctionnement de l'université. C'est déjà le cas avec l'ISITE, puisque l'uB vient de provisionner 300 000 euros par an sur trois ans afin de garantir l'interopérabilité des systèmes d'information des établissements de la COMUE. Dans tous les cas, des inégalités criantes vont voir le jour entre ceux qui pourront facilement générer de l'argent et les autres. La communauté universitaire déjà très divisée ne s'en remettra pas.

Ces évolutions sont imposées par l'Etat, mais elles sont bien accueillies par l'équipe présidentielle, qui peut en tirer parti pour renforcer ses domaines de prédilections en sacrifiant les autres laboratoires et formations. Les réformes devant en principe offrir l'autonomie aux université conduisent en fait à leur servitude volontaire : assécher leurs sources de financement pour les contraindre par les appels d'offre à ne trouver de salut que dans les orientations imposées par le ministère, perdant de fait une grande partie de cette prétendue autonomie et abandonnant progressivement des pans disciplinaires entiers. L'autocontrôle est l'un des mécanismes les plus puissants du néolibéralisme. Le seul choix « raisonnable » ou « responsable » est de suivre les instructions donnant lieu à une marchandisation croissante de l'enseignement supérieur et de la recherche, en contradiction avec notre éthique professionnelle, sans être certain qu'elles produisent les retombées attendues. Ces retombées sont censées créer des emplois, mais on peut se demander combien de startups innovantes et disruptives il faudrait pour créer 4 millions d'emplois. Pendant ce temps, les inégalités territoriales, la caporalisation, la bureaucratisation et l'impossibilité de mener nos missions sereinement sont, elles, bien réelles.

En conséquence, puisque les économies qui ont été imposées se révèlent à posteriori injustifiées, nous demandons que les départs soient tous remplacés dans la prochaine campagne d'emplois, et que les postes actuellement gelés ou dont la publication est différée soient progressivement ouverts au concours, à la place de contrats précaires.

SNESUP-FSU SNCS-FSU SNASUB-FSU