Plus de 4 ans ans après la publication de l’ordonnance du 12 décembre 2018 donnant aux établissements de l’ESR la possibilité d’expérimenter des dérogations au Code de l’éducation, au moment où les fusions expérimentées sont coûteuses pour un gain à l’échelle des personnels et des étudiant·es que l’on s’épuise à chercher, un nombre croissant d’établissements, dont désormais l’Université de Bourgogne, s’engage aussi dans la voie du statut d’Établissement Public Expérimental (EPE ou EPEx).

Qui que soient les Président.es des universités respectives que sont l’uB et l’UFC, depuis le début de son existence, l’administration de l’UBFC navigue de crise en crise. Les dernières en date, la perte de l’I-SITE puis le refus du double siège par le MESRI, ont mené à la situation actuelle.

L’université de Bourgogne, par un vote de son CA le 1er septembre 2022, avait conditionné son maintien dans la COMUE à l’acceptation du double siège. Cette condition ayant été refusée par le MESRI, de fait, l’université de Bourgogne devrait sortir de la COMUE à la date effective du 31 décembre 2023. L’école de commerce BSB, établissement membre de la COMUE UBFC, a choisi de suivre l’université de Bourgogne. Les autres établissements membres de la COMUE, y compris un établissement dijonnais présent sur notre campus, Agrosup, ont décidé de rester dans la COMUE. Les autres établissements membres de la COMUE ont opté pour se diriger vers une ComueEx (Comue Expérimentale). L'équipe dirigeante de l’Université de Bourgogne a opté pour un EPE (Établissement Public Expérimental).

Avons-nous toutes et tous été largement consulté⋅es sur ce choix ? Non. Y a-t-il eu un débat sur les choix stratégiques en matière de formation et de recherche dans notre université ? Non. Dans notre profession de foi, lors des élections aux conseils centraux de 2020, nous demandions l’organisation d’un débat suivi d’un référendum de tous les personnels pour décider si l’uB devait rester dans la COMUE ou tout autre établissement expérimental. Nous réitérons cette demande.

Ce que nous avons toujours défendu depuis la mise en place de la politique de site, qui n’avait comme objectif que de s’élever dans les classements internationaux absurdes, c’est le modèle de l’association (possibilité offerte par la loi Fioraso), forme plus légère de rapprochement qui permet de financer les équipes travaillant ensemble sans ajouter de surcouche administrative. Une association d’établissements se centrant sur les projets de collaborations communs, des coopérations choisies et où les personnels des établissements auraient leur mot à dire.

Quel objectif ? Quel choix avons-nous réellement ?

Le mot commun aux deux formes de regroupement ComueEx et EPE est « expérimental ». Il signifie qu’il est alors possible de déroger au code de l'éducation (sur les frais d'inscriptions, sur la représentation des personnels dans les conseils, sur les statuts des personnels, etc.). En effet, dans les EPE ou les ComuEx, l’ensemble des dispositions relatives à la composition des conseils centraux, en particulier celles qui concernent les modalités électorales, les conditions d’exercice du droit électoral, la composition des collèges électoraux et les modalités de désignation des personnalités extérieures (dans les limites prévues à l’ar­ticle 10 de l’ordonnance), sont dérogatoires aux articles du Code de l’éducation (art. L. 719-1 à 719-3). Rappelons-le, la finalité de ces regroupements est la fusion sous les statuts d’un grand établissement, c’est-à-dire des statuts qui, comme ceux des grandes écoles (GE), réduisent dans les CA le nombre de personnels et d'étudiant.es élu.es et augmentent le nombre de personnalités extérieures nommées, représentant les financeurs publics ou défendant des intérêts privés d’employeurs ou de commanditaires de projets de recherche. Ainsi à l’université Gustave-Eiffel, sur les 35 membres du CA, seuls 15 sont des élu.es des personnels. La structuration des collèges électoraux ne réservant aucune représentation minimale aux enseignant.es et enseignant.es-chercheur.es, un conseil ad hoc a dû être créé pour statuer sur les décisions relatives aux carrières des collègues… L’établissement expérimental disposera d’un droit de regard sur les recrutements effectués au niveau des établissements composantes.

Ce que nous défendons, c’est un conseil d’administration avec des compétences politiques et composé d’une majorité de personnes élues (et non nommées) par un scrutin de liste commun aux établissements concernés par l’association.

Pour masquer le sous-investissement, et de fait le désenga­gement financier de l’État dans l’ESR comme dans l’ensemble des services publics, on pousse en avant une structuration dont l’objet est avant tout d’obtenir des subsides externes. La carotte de ces « expérimentations » est la possibilité d’émarger aux PIA pour arracher quelques moyens qui, loin de combler le sous-financement de la subvention pour charge de service public, sont le plus souvent absorbés par les coûts de ces réorganisations comme les fusions strasbourgeoise et lilloise l’ont déjà illustré.

Ce que nous défendons, c’est le rééquilibrage de la distribution des financements en mettant fin à la concentration des moyens sur une minorité de chercheur.es « excellent.es » et/ou sur les thématiques relevant de domaines à la mode.

Ces réformes menées ont pour principale conséquence la mise en concurrence généralisée des universités et des équipes de recherche entre elles et un sentiment de perte de sens de nos métiers lié au temps consacré à la recherche de financements pour répondre aux nombreux desiderata des financeurs.

Ce que nous défendons, c’est le développement de collaborations respectueuses des spécificités, des missions et des prérogatives des établissements et des organismes, assurant la défense et le maintien de toutes les disciplines scientifiques.

Toutes ces formes de regroupements, les trois nouveaux types (EPE, ComueEx, Convention de coordination territoriale) ont pour conséquence la création d’une surcouche administrative et l’éloignement des décisions pour les personnels et les étudiant.es, et une place minorée pour leurs représentant.es élu.es ans les conseils.

Ce que nous défendons, c’est une décentralisation des décisions pour qu'elles soient prises au plus proche des équipes concernées, la clarification des circuits et des mécanismes de prises de décision, la transparence des critères d'attribution des ressources, et la souveraineté des conseils des universités et établissements.

Ce qui nous arrive est le résultat d’une série de réformes sur lesquelles il faut revenir pour inventer une autre université. Un autre modèle est possible.

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